Bagnes et justice militaire

Le Garm a été confronté très tôt au problème de la justice militaire. Les objecteurs de conscience ne voulaient pas dépendre des TPFA (Tribunaux Permanents de Forces Armées). La justice militaire était une justice d’exception en France. C’est dans les prisons militaires, ou dans les bagnes militaires que les soldats purgeaient les peines qui leur étaient infligées lorsqu’ils étaient sanctionnés pour refus d’obéissance, rébellion, mutilation volontaire, etc.

Des militants du Garm, dont Michel Tachon, ont fait paraître un dossier spécial sur Fort Aiton, fin avril 1971. Il s’agit d’une compilation de témoignages, d’articles de presse, de dénonciations sur cette forteresse militaire située en Savoie. Cela a amené la parution quelques mois plus tard d’une brochure aux éditions Maspero, dans la collection « dossiers partisans », signée André Ruff, Gérard Simonnet et Michel Tachon. Fin 1971, un tract du Garm dénonçait l’existence des deux bagnes militaires de Fort Aiton, et de la C.I.L.A. (Compagnie d’Infanterie Légère d’Afrique), à Djibouti. Ce tract demandait leur suppression.

De nombreuses actions ont eu lieu pour dénoncer les TPFA, en particulier celui de Lyon, bien entendu. En janvier 1972, à l’occasion de la réouverture du tribunal, des membres du Garm avaient organisé une manifestation (en soutien à Jean-Michel Fayard et François Janin). Sept militants avaient assisté à la séance du tribunal militaire. En février 1975, le Garm, avec d’autres organisations lyonnaises, signait une brochure : « La justice militaire, ce qu’il faut savoir ». Une des actions les plus spectaculaires s’est déroulée dans la nuit du 21 au 22 mai 1976. La porte du tribunal a été murée par des militants, avec une banderole explicite : « Fermeture pour cause d’inutilité publique ».

Depuis le 4 octobre 1974, des militants assistaient régulièrement aux audiences du tribunal militaire. Cela donnait lieu à la parution régulière de « Notes sur le tribunal militaire de Lyon ». Les militants faisaient des statistiques sur la nature des inculpations, sur les peines prononcées. Il y avait à chaque fois une synthèse rapide, par exemple sur la proportion d’inculpés pour raisons politiques. Ce travail a débouché sur la publication d’un livre en 1977 : « Les juges kaki », de Mireille Debard et Jean-Luc Hennig (journaliste à Libération ; Mireille Debard participait régulièrement à l’édition lyonnaise du quotidien). Tout cela a permis de dénoncer une juridiction d’exception qui sera supprimée par Mitterrand après son élection (loi du 21 juillet 1982). Les bagnes militaires ont été supprimés. C’est maintenant la justice civile qui juge les militaires en cas de délit ou de crime.

Les villes où étaient implantés les T.P.F.A. : Paris, Lille, Rennes, Bordeaux, Lyon, Marseille, Metz, Landau (Allemagne ; il y avait à l’époque une forte présence militaire française dans ce pays)